Compte-rendu de la visite descriptive au musée des Beaux-Arts de Caen du samedi 9 avril 2011

Le samedi 9 avril dernier, deux groupes de déficients visuels ont pu participer à la quatrième visite descriptive de la saison 2010-2011 organisée par le musée des Beaux-arts de Caen. Le tableau de Nicolas Poussin choisi pour cette visite s'intitule " Vénus pleurant Adonis ".
Comme lors des précédentes visites descriptives, une représentation en relief de la peinture décrite nous a été distribuée par Anne-Sophie Bertrand.

L'œuvre que Pascale FISZLEWICZ nous présente ici date environ de 1625. Elle a été réalisée à Rome où s'était installé le peintre. C'est le poète Cavalier Marin qui a fait prendre conscience à Nicolas Poussin que sa peinture pouvait être poétique. En effet, à partir de ce constat, l'artiste n'a pas hésité à peindre des poèmes mythologiques.
L'œuvre qui nous a été présentée est d'ailleurs une brillante représentation d'une scène inspirée par les métamorphoses d'Ovide.

Jusqu'à cette période, la peinture représentait surtout des scènes d'inspiration religieuse et donc très pudiques. Mais les artistes ont bien vite trouvé le moyen de contourner cette tendance. Ainsi, la mythologie leur permettait-elle de s'exprimer de façon beaucoup plus libre : ils pouvaient créer des personnages nus sans s'attirer les foudres de la censure. C'est ce qu'a fait Nicolas Poussin en réalisant la toile « Vénus pleurant Adonis », que l'on pourrait classer dans la "peinture coquine".

Ce tableau n'est pas d'une dimension habituelle (57 par 128 cm). Il est très allongé, ce qui laisse penser qu'il a été commandé pour être placé au-dessus d'une porte.

La scène que nous décrit Pascale se joue après l'arrivée de Vénus descendue des cieux dans son char pour secourir Adonis qui vient d'être mortellement blessé par un sanglier.
On peut donc voir sur cette toile le corps d'Adonis, allongé sur le dos, les jambes et un bras un peu pliés, l'autre gisant comme s'il dormait. Adonis repose sur un drap orange. Il a pour tout vêtement une étoffe de couleur bleu, qui laisse apparaître ses cuisses, ses genoux ainsi que son thorax. Le tissu se prolonge pour couvrir son bras droit.
Sur le sol, devant lui, se trouvent son javelot ainsi que son cor de chasse. On aperçoit également une tache rouge provenant de sa blessure.

Au-dessus d'Adonis dans le tableau, se trouve tout d'abord Vénus, agenouillée, se penchant sur le corps de son bien-aimé. Elle se tient au niveau de sa hanche. Elle aussi est quasiment nue, seul un fin tissu blanc recouvrant son dos et partiellement sa poitrine. Ses longs cheveux brun-roux sont défaits, tombant sur son dos. Elle tient dans sa main droite une aiguière dorée d'où s'écoule un liquide tombant goutte à goutte sur les plaies de son amant. Ce nectar semble se mélanger au sang pour faire apparaître des anémones. De cette façon, Adonis renaîtra sous la forme de fleurs.

Un autre personnage se trouve près de la tête du gisant : un puto. Il s'agit d'un poupon tout nu, rose et joufflu. Il cueille les anémones qui poussent autour de lui.
Un second puto se trouve entre le premier et Vénus. Il serre ses petits poings sur ses yeux pour exprimer son chagrin.

Un dernier personnage apparaît très discrètement dans ce décor, un personnage poétique puisqu'il s'agit du Dieu fleuve. Il est lui aussi allongé, comme Adonis, près du char de Vénus et semble bien triste.

Bien que ce tableau soit assez sombre, il ne manque pas de couleurs. Les yeux sont attirés par le blanc éclatant de deux colombes qui se regardent, posées sur le char, ainsi que par le grand drapé rouge posé sur le char doré de Vénus et le morceau d'étoffe bleu couvrant le corps d'Adonis.

Pascale nous a décrit ensuite le paysage. Il se compose sur la droite d'un tronc d'arbre dont on ne peut pas voir les branches. Un autre arbre se trouve derrière Vénus et se penche vers la scène, adoptant le même mouvement en arc de cercle. Une branche de cet arbre semble couronner Vénus.
Toujours sur la droite, au deuxième plan, sur un petit tertre, on aperçoit deux petits arbres et plus loin en retrait une ville fortifiée.
Dans la partie gauche du tableau, au dessus du Dieu fleuve, se projette un bouquet de feuilles dont on ne peut pas voir le tronc. Puis vient un arbre possédant deux troncs en forme de V dont les feuilles ne sont pas visibles. Sur la gauche sont également représentés de gros nuages noirs.
Ce paysage évoque la fin du jour par ses couleurs un peu sombres.
Ainsi, ce tableau qui représente la mort d'Adonis, représente aussi la mort de la journée. Cependant il ne paraît pas triste car nous pouvons y lire la manifestation d'un grand Amour et la résurrection par la transformation d'un corps en fleurs.

Cette œuvre ne manque pas de symbolique, tout y est poétique, le plus souvent évoqué de façon mystique.

Après avoir répondu à nos questions, Pascale propose aux personnes qui le souhaitent de prendre les postures des personnages ou de nous les montrer sur un corps réel.
Nous sommes repartis enchantés par la description qui nous a été proposée pour cette avant-dernière visite de la saison et nous espérons que la prochaine nous fera découvrir de nouvelles œuvres aussi intéressantes.

Rédigé par Nicolas Fortin, le 19 avril 2011.

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